Mesdames et messieurs ;
Nous déclarons l’ouverture de cette audience solennelle au titre de l’année judiciaire 2025 sur Haute autorisation de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu l’assiste, Président du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire.
C’est l’occasion pour les composantes du pouvoir judiciaire de renouveler leur allégeance à Sa Majesté et de réaffirmer leur adhésion totale au système de bonne gouvernance dont Sa Majesté a tracé la voie.
Avant d’entamer ce discours, permettez-moi de souhaiter la bienvenue à nos chers invités qui nous ont fait l’honneur de se joindre à nous, ce qui non seulement nous honore mais symbolise pour tous les magistrats du Royaume un soutien à l’indépendance du pouvoir judiciaire et une reconnaissance de leur contribution à l’édification d’un Etat de droit et des institutions. Votre présence parmi nous exprime également la volonté des pouvoirs publics de mettre en œuvre le principe constitutionnel de coopération entre les pouvoirs.
Je vous remercie donc chacun en son nom et en sa qualité.
Mesdames et messieurs ;
L'année écoulée (2024) a été marquée par une perturbation du fonctionnement des tribunaux due aux protestations sociales menées par les greffiers et par certaines autres professions judiciaires, qui ont eu un impact notable sur le bon fonctionnement de l'activité judiciaire, notamment la perturbation du déroulement des audiences, le non-enregistrement des dossiers et les retards dans la conduite des procédures. Néanmoins, les tribunaux du Royaume ont connu une forte activité, avec 4.330.994 nouveaux dossiers enregistrés. Aussi, les magistrats ont pu statuer sur 4 466 727 affaires, soit 103 % des affaires enregistrées et 88,5 % du nombre total d'affaires pendantes.
Et si le nombre total d’affaires pendantes a avoisiné les 5.052.086 affaires, le nombre d’affaires arriérées était de 577 851, de qui signifie que le reliquat a été réduit de 142 760 affaires.
Activité générale des juridictions du Royaume :
| Reliquat de l’année précédente. | Affaires enregistrées au cours de l’année | Affaires pendantes au cours de l’année | Affaires jugées au cours de l’année | Reliquat de l’année 2024 |
2023 | 767.847 | 4.662.563 | 5.427.290 | 4.700.950 | 720.611 |
2024 | 720.611 | 4.330.994 | 5.052.086 | 4.466.727 | 577.851 |
| 2023 | 2024 |
Pourcentage d’affaires jugées des affaires enregistrées | 101% | 103.3% |
Pourcentage d’affaires jugées des affaires pendantes | 86.48% | 88.58% |
Mesdames et messieurs ;
De son côté, la Cour de cassation a pu en 2024 trancher 52 904 affaires, soit 109 % des 48 210 nouvelles affaires enregistrées au cours de l'année. Les conseillers de la Cour ont pu réduire l'arriéré de 4 698 affaires, soit 9 %, passant de 51 247 affaires fin 2023 à 46 549 fin 2024. Le nombre de cas annulés a atteint 12 474 décisions. Cela représente 23,6 % du total des décisions rendues par la Cour au cours de l'année, contre 76,4 % de décisions rejetées, déclarées non-recevables ou la demande était déchue.
Activité de la Cour de cassation :
| 2023 | 2024 | Degré de variation |
Affaires enregistrées | 48.130 | 48.210 | Stable |
Affaires pendantes | 98.004 | 99.457 | Augmentation minime |
Affaires jugées | 46.757 | 52.904 | Amélioration de 13% |
Reliquat | 51.247 | 46.549 | Amélioration de 9% (Baisse) |
| 2023 | 2024 |
Pourcentage d’affaires jugées des affaires enregistrées | 97,15% | 109% |
Pourcentage des affaires jugées des affaires pendantes | 47,71% | 53% |
Pourcentage de diminution du reliquat | --- | 9% |
Pourcentage des décisions cassées | --- | 23,6% |
D'autre part, la Cour de cassation a continué, au cours de l'année écoulée, à jouer son rôle normateur, ce qui a abouti à la publication de décisions courageuses qui encadrent le travail judiciaire des juridictions de fond en ce qui concerne l'application des dispositions législatives, contribuant ainsi à l'uniformisation de la jurisprudence et à la réalisation de la sécurité judiciaire.
Ainsi la Chambre foncière a jugé que « Le logement accordé au père de famille en son propre nom dans le cadre d’un programme de soutien social est en réalité accordé à tous les membres de la famille du moment qu’il leur a été accordé gratuitement ou à bas prix, même dans le cas où le père de famille aurait été le seul à l’avoir payé, puisque le but de l’octroi de ce logement est de lutter contre la précarité et d’améliorer la situation des familles démunies et de ce fait, la séparation des époux ne prive pas la femme divorcée du logement sous prétexte qu’il est inscrit au nom de son époux, étant donné que la finalité est d’en faire bénéficier la famille. » (Arrêt n°252-7 du 02 avril 2024, dossier foncier n°6525/07/04/2022).
La Chambre du Statut personnel et des successions a considéré que « L’épouse a le droit de recevoir la moitié du prix du bien immeuble inscrit uniquement au nom de son époux, étant donné que les deux époux ont convenu au moment de l’établissement de leur acte de mariage de répartir par moitié tous les biens acquis pendant leur mariage, et la juridiction de fond n’avait donc nullement besoin de s’enquérir du degré de contribution de l’épouse à l’argent qu’elle sollicite ni de savoir lequel des époux a acquis le bien immeuble de son propre argent puisque l’existence d’un accord écrit la dispense de ce faire. » (Arrêt de la Chambre du Statut personnel n°158/1 du 10/09/2023, dossier n°1102/2/1/2023).
La Cour de cassation a également décidé en deux Chambres conjointes que « Le relevé du compte que présente l’avocat dans le cadre de l’instance pour fixer ses honoraires représente une récapitulation des transactions financières effectuées tout au long de la période de représentation par l’avocat de son client, et un moyen de preuve des dépenses réalisées. La non contestation du relevé du compte dans le délai légal entraine la déchéance de ce droit, en application du second alinéa de l’article 51 de la loi organisant la profession d’avocat, mais cette déchéance se limite aux dépenses. » (Arrêt n°464/1 du 28/05/2024)
La Chambre civile a affirmé que « Les honoraires de l’avocat dus par l’entreprise faisant l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire doivent, à l’instar des autres créances de l’entreprise, être séparées en créances nées avant le prononcé de la décision d’ouverture de la procédure de liquidation, celles-ci doivent dans ce cas être déclarées au syndic sous peine de déchéance, conformément à l’article 686 et suivants du Code de commerce, et en créances nées a postériori, tel qu’il est le cas pour la présente décision. Le critère retenu dans la distinction entre ces deux catégories étant la date de constitution de la créance et non sa date d’exigibilité. » (Arrêt de la Chambre civile n°901/1 du 19/12/2023 dossier civil n°4196/1/1/2023)
La même Chambre a également considéré que « La convention franco-marocaine dispense de l’obligation de légalisation et de tout acte similaire, mais n’exempt pas du revêtement de la mention d’exequatur. Que, les décisions du bâtonnier fixant les honoraires d’avocat ne sont exécutoires qu’après l’écoulement du délai de recours et leur revêtement de la formule exécutoire ; et que l’ordonnance judiciaire étrangère prononçant l’exequatur est celle devant être revêtue de la formule exécutoire par-devant la juridiction marocaine et non la décision du bâtonnier de l’Ordre français des avocats » (Arrêt de la Chambre civile n°326/1 du 23/04/2024 dossier civil n°6559/1/1/2022)
La Chambre commerciale a décidé que « Le dépassement répété et continu du plafond de crédit objet du contrat d’ouverture de crédit accordé par la banque à son client à travers le paiement par la banque des dettes du client pour des montants dépassant le plafond fixé en vertu du contrat précité, est considérée comme étant une modification dudit contrat qui donne le droit au client de bénéficier de la couverture de ses dettes au seuil du nouveau plafond » (Arrêt de la Chambre commerciale n°517/3 du 10/09/2024 dossier n°657/3/3/2024)
La même Chambre a considéré que « L’excès d’augmentation par la banque du plafond de crédit accordé à son client ne constitue pas une faute génératrice de responsabilité sauf s’il s’avère qu’elle était au courant de l’état de détérioration irrémédiable de la situation financière de son client mais qu’elle continuait tout de même à hausser le plafond du crédit » (Arrêt de la Chambre commerciale n°299/3 du 23/04/2024 dossier n°962/3/3/2023)
La Chambre administrative a quant à elle décidé que « Les redevances dues suite aux travaux additionnels sont subordonnées à la réalisation effective de ces travaux et il n’y a pas lieu pour l’administration d’invoquer le non établissement d’un avenant au contrat du marché concernant ces travaux ou la publication d’une décision ordonnant leur réalisation, du moment que ces travaux ont été réalisés à la demande de l’administration et conformément aux critères approuvés et qu’elle en a obtenu la pleine jouissance après leur réalisation. »
Elle aussi considéré que « Bénéficier conjointement des intérêts moratoires et des intérêts légaux demeure possible du moment que le but de leur jonction est de réparer deux dommages différents, comme dans le cas d’espèce, puisque les intérêts moratoires accordés font office de pénalité découlant du non-respect par l’administration de son engagement précité dans le délai imparti, alors que les intérêts légaux constituent une réparation du dommage subi par le contractant avec l’administration résultant du retard de paiement par celle-ci des sommes auxquelles elle a été condamnée. » (Arrêt de la Chambre administrative n°562/2 du 02/05/2024 dossier n°5715/4/2/2023).
La Chambre administrative a aussi statué en affirmant que « L’Etat ne peut aucunement être tenu de la garantie de la sécurité d’un sinistré sur son territoire, sauf s’il est établi une faute grave de sa part. L’indemnisation des victimes des attentats terroristes se fait dans le cadre des règles de justice et d’équité et selon les considérations humanitaires basées sur la solidarité nationale, en se référant au Dahir n°1-03-178 du 11/09/2003 octroyant une dotation financière aux ayants droit des victimes des actes terroristes survenus à Casablanca en date du 16 mai 2003 ». (Arrêt de la Chambre administrative n°732/3 du 23/03/2024 dossier n°6023/4/3/2024)
La Chambre sociale a décidé que « Encourt la cassation pour insuffisance de motivation qui équivaut à son défaut, la décision de la Cour d’appel qui fait droit à la prétention de l’employeuse de l’abandon de poste sans préavis de la d’une salariée ayant justifié son absence de six jours pour se faire opérer d’une tumeur au cerveau, prolongée de 34 jours par deux certificats médicaux adressés à l’employeuse, via l’application « Whatsapp » qui est d’usage habituel dans les correspondances de l’entreprise, certificats que le responsable à l’entreprise a dûment reçu, et que dès lors, l’employeuse a bien été informée de l’absence qui n’a fait l’objet d’aucune contestation de sa part. » (Arrêt de la Chambre sociale n°46/1 du 23/01/2024 dossier n°237/5/1/2023)
La même Chambre a décidé que « Le contrat conclu avec un auto-entrepreneur ne fait pas office de contrat de travail vu l’inexistence de l’élément de subordination entre l’entreprise et l’auto-entrepreneur. » (Arrêt de la Chambre sociale n°887/1 du 29/10/2024 dossier social n°2995/5/1/2024)
Dans un autre arrêt cette Chambre a décidé que « Le contrat de stage professionnel conclu entre l’ANAPEC, l’entreprise et les demandeurs d’emploi, ne peut être qualifié de contrat de travail, du moment que l’objectif de ce contrat pour l’employeur, conformément au Dahir portant loi n°1-93-16 du 23 mars 1993, est de développer les ressources humaines de l’entreprise et d’améliorer leur encadrement à travers le recrutement et l’insertion de jeunes diplômés, et pour les demandeurs d’emploi, l’objectif est d’accroitre leur employabilité par l’acquisition de nouvelles compétences professionnelles, notamment par une première expérience en entreprise, qui contribuerait à faciliter leur insertion dans la vie professionnelle. » (Arrêt de la Chambre sociale n°366/1 du 16 avril 2024 dossier social n°2036/5/1/2023).
Pour sa part, la Chambre pénale a considéré que «Le crime d’attentat à la pudeur prévu à l’article 485 du Code pénal se consomme du seul fait de l’atteinte à l’intégrité physique de la victime sans son consentement, nonobstant que des actes sexuels aient été exercés sur la victime ou qu’il y ait eu tentative de ce faire, alors même que le coupable aurait une impotence sexuelle, étant donné que l’attentat à la pudeur se consomme par tous les moyens, même dans le cas où le coupable n’aurait pas eu de rapports sexuels non consentis avec la victime » (Arrêt de la Chambre pénale n°805/11 du 19/09/2024 dossier n°26107/6/11/2024).
La même Chambre a aussi considéré que « Viol les dispositions de l’article 569 du CPP, la Cour qui a considéré que le recours en révision intenté par le condamné devant le Procureur général du Roi près la Cour de cassation, suspend l’exécution de la condamnation, alors que, selon l’article précité, le recours en révision qui suspend l’exécution de la peine est celui porté devant la Cour de cassation. » (Arrêt de la Chambre pénale n°1238/1 du 24/07/2024 dossier n°9959/6/1/2024).
La Cour de cassation statuant en deux Chambres conjointes a décidé que « La juridiction de renvoi a respecté le motif de renvoi contenu dans l’arrêt de cassation puisqu’elle a convoqué, pour audition, les deux adouls ayant rédigé le document argué de faux, mais dont la comparution s’est avérée impossible du fait de leur décès ; la juridiction de renvoi a également ordonné que le registre de conservation soit présenté mais celui-ci n’a pas été retrouvé. Que par conséquent, l’inaccomplissement de ces deux mesures n’affecte pas sa décision. » (Arrêt conjoint de la Chambre pénale et de la Chambre civile n°1436 du 24/09/2024 dossier pénal n°14439/6/4/2022).
Mesdames et messieurs ;
Les arrêts référencés ne sont qu'un aperçu des positions de la Cour de cassation. Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire continuera à publier, gratuitement, les arrêts de la Cour de cassation sur son site officiel, tel qu’il le fait depuis 2022. Au cours de l'année écoulée, le Conseil a pu ajouter environ 12 000 nouvelles décisions au site, ce qui porte le nombre de décisions de la Cour de cassation publiées sur le site du CSPJ à 36 000 à la fin de l'année dernière, auxquelles s'ajoutent plus de 688 arrêts de différentes cours d'appel et 364 jugements de tribunaux de première instance.
Tout en notant avec grande fierté que le nombre de visites sur le site web a avoisiné les 13 millions de visiteurs depuis 130 pays, le Conseil veillera à développer ses services électroniques au profit de tous les professionnels de la justice et à accroître la fréquence de publication des textes et études juridiques, et des articles et documents de recherche rédigés par des juges, afin de promouvoir la diffusion des connaissances et de l'information juridique et judiciaire.
En honorant cet engagement prévu à l'article 108 bis de sa loi organique, le Conseil vise à soutenir la sécurité judiciaire en offrant aux magistrats, aux avocats et à toutes les parties concernées ou intéressées par les affaires judiciaires la possibilité de se familiariser avec les orientations de la Cour de cassation et de les adopter dans des litiges similaires, ainsi que d'œuvrer en faveur de la qualité des décisions de justice, de la rationalisation des recours et de la stabilité des transactions.
Mesdames et messieurs ;
Au cours de l'année écoulée, le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire a poursuivi l’exécution des axes de son plan stratégique. Si le public prend connaissance de ce qui a été réalisé sur ce plan à travers les rapports annuels du Conseil publiés au Bulletin officiel du Royaume, la corrélation directe entre plusieurs axes du plan stratégique du Conseil et le bon déroulement du travail judiciaire à la Cour de cassation et dans les juridictions du Royaume requiert une brève énumération de certains d'entre eux.
Dans ce contexte, le Conseil s'est employé au cours de l'année écoulée à suivre la mise en œuvre de sa décision portant sur les délais indicatifs liés à la norme constitutionnelle sur les délais raisonnables impartis aux juridictions pour trancher les litiges. Les services du Conseil ont suivi l'état d'avancement des dossiers et ont informé les juridictions des motifs procéduraux à l'origine des retards dans la délivrance de la décision afin d'œuvrer à leur résorption dans le cadre prévu par la loi.
Moyenne du respect par les juridictions de fond des délais indicatifs
Type d’affaires | Pourcentage par rapport au délai indicatif |
Affaires civiles, foncières et sociales | 72% |
Affaires criminelles | 75% |
Affaires commerciales | 77.50% |
Il est à noter que le Conseil a adopté une approche participative lors de la détermination des délais raisonnables indicatifs et a expliqué aux magistrats du Royaume dans sa circulaire n° 37 que le but de son contrôle de l'application des délais raisonnables est avant tout de remédier aux irrégularités de gestion qui conduisent à une perte du temps judiciaire, telles que l'absence d'assignation ou d'expertise dans les délais prescrits. Le Conseil a également souligné la nécessité de respecter les procédures, les garanties d'un procès équitable et les droits de la défense, qui ne doivent pas être affectés par l'application de ces délais.
Au cours de l'année écoulée, le Conseil, en coopération et en coordination avec le ministère de la Justice, a entamé la mise en œuvre de certains des paragraphes du plan de numérisation des tribunaux. À l'heure actuelle, des préparatifs sont en cours pour introduire un logiciel permettant l'impression des décisions par les magistrats et leur signature de manière électronique, afin de faciliter leur circulation et leur distribution. En plus de l'expérimentation d'autres logiciels développés par le ministère de la justice, dont l'impression automatisée des jugements par saisie vocale, l'enregistrement à distance des ordonnances d’injonction de payer et leur traitement via un portail électronique, en plus d'autres services annoncés par l'autorité gouvernementale chargée de la justice.
Le Conseil estime que la transition numérique n'est pas une option, mais une nécessité urgente qui conditionne l'avenir de la justice, et que tout retard dans sa réalisation affectera le fonctionnement de la justice à l'avenir, et que les différents acteurs de la justice dans notre pays doivent donc y adhérer, en particulier les magistrats et les juridictions du Royaume. C'est pourquoi l'article 108 bis de la loi organique du Conseil prévoit une coordination entre le pouvoir judiciaire et le ministère de la Justice pour le développement des logiciels nécessaires à l'exercice des fonctions judiciaires au sein des tribunaux et à la numérisation des services et procédures judiciaires. Aujourd'hui, nous voyons les premiers résultats de cette coordination, puisque plusieurs logiciels liés aux services numériques pour les tribunaux sont en cours d'expérimentation. Je tiens à remercier et à féliciter le ministre de la justice et le personnel du ministère pour leur coopération fructueuse et sérieuse.
D'autre part, le Pôle de gestion des systèmes informatiques du Conseil a été en mesure de développer plusieurs logiciels qui ont aidé le Conseil à mener à bien ses tâches liées à la gestion des situations professionnelles des magistrats, lesquels sont en cours de développement afin de mettre en place un système numérique intégral dans ce domaine. Je tiens à rendre hommage aux ingénieurs et au personnel du Pôle de gestion des systèmes informatiques pour les efforts qu'ils ont déployés à cet effet.
Dans le cadre du respect des engagements énoncés dans son plan stratégique, le Conseil a pu, au cours de l'année écoulée, concrétiser certains des programmes qu'il avait introduits pour améliorer le statut social des magistrats, de manière à contribuer à la stabilité matérielle et à la tranquillité des familles, notamment la mise en œuvre de près de 2000 avancements de grade, dont environ 1200 avancements du grade exceptionnel au grade nouvellement créé, ainsi que l'effort visant à créer des conditions de stabilité sur le lieu de travail des magistrats, qui a pour but d'accroître le niveau d'efficacité judiciaire et de contrôler le fonctionnement des juridictions.
Avancements des magistrats au titre de l’année 2023 appliqués au cours de l’année 2024
Grade | Nombre d’avancements |
Avancement vers le 2ème grade | 492 |
Avancement vers le 1er grade | 140 |
Avancement vers le grade exceptionnel | 150 |
Avancement vers le grade supérieur | 1192 |
Total | 1974 |
Le Conseil, qui continue d'étudier les situations sociales et professionnelles des magistrats et cherche à les améliorer, se préoccupe tout autant de la déontologie du système judiciaire. A cette fin, il adopte différentes approches, à commencer par une approche de sensibilisation et d'encadrement, qui est menée très efficacement par le Comité de déontologie du Conseil et par les conseillers en déontologie, à travers des séminaires scientifiques, des réunions directes dans les locaux des tribunaux et des cours dédiés aux attachés judiciaires, ainsi que par le biais de périodiques et de la publication des décisions du Conseil en la matière.
L'approche juridique aborde la question en attirant l'attention des magistrats sur des violations déontologiques et professionnelles mineures et en invitant certains d'entre eux à suivre des sessions de formation sur la déontologie judiciaire et certaines procédures professionnelles. L'approche juridique se réalise également par l'exécution des mesures disciplinaires, où la fermeté de l'Inspection générale des affaires judiciaires et des rapporteurs nommés par le Conseil transparait clairement dans le caractère sérieux des enquêtes et des investigations.
En outre, si le Conseil utilise des méthodes correctives pour rectifier les erreurs judiciaires, il est extrêmement strict dans le traitement des infractions qui portent atteinte à l'indépendance de la magistrature et à l'intégrité, à la neutralité et à l'impartialité des magistrats. Il convient de mentionner qu'au cours de cette année, le Conseil a été en mesure de liquider la majorité des dossiers arriérés des années précédentes. Cela a été possible, d'une part, grâce au soutien de l'Inspection générale par l'apport du personnel et des moyens nécessaires et, d'autre part, grâce à la procédure introduite par la loi organique, à savoir la liquidation des dossiers par le Comité de discipline, qui a atteint l'efficacité requise, ce qui a eu un impact positif sur la situation administrative des magistrats concernés, à la fois en termes de prise de décision sur leurs avancements en suspens et de réduction du fardeau moral qui pèse sur eux.
Mesures disciplinaires prises en 2024
| Nombre de rapports | Nombre de magistrats concernés |
Total des rapports élaborés par l’Inspection générale | 683 | 1324 |
Rapports sauvegardés | 573 | 1135 |
Approfondissement de l’enquête | 5 | 8 |
Rapports soumis au rapporteur | 92 | 168 |
Approbation de l’estimation du patrimoine | 19 | 13 |
| Nombre de rapports | Nombre de magistrats concernés |
Total des rapports | 61 | 91 |
Rapports sauvegardés | 17 | 21 |
Rapports soumis au Comité de discipline | 44 | 70 |
Rapports du Comité de discipline (nombre de magistrats)
Sanctions de premier degré | Sanctions de second degré | Révocation cessation des fonctions | Mise à la retraite d’office | Mise hors de cause | Total |
20 | 9 | 6 | 1 | 23 | 59 |
Par ailleurs, l'année 2024 a été marquée par l'achèvement de la première phase du plan stratégique du Conseil visant à encadrer la sphère associative des magistrats. Le Conseil travaille actuellement avec les associations professionnelles de magistrats sur l'élaboration d'un document de référence pour la communication entre les associations de magistrats et les institutions de l'autorité judiciaire, fondé sur le respect de la Constitution et de la loi et le respect des us et coutumes judiciaires séculaires, principalement l’obligation pour les magistrats d’éviter l’exercice d’activités syndicales et la prise de positions politiques tel que l’interdit la Constitution. Il est aussi impératif que les principes fondamentaux de la magistrature prévalent sur toute considération partisane. En particulier, l'adhésion aux valeurs d'indépendance, d'intégrité, d'impartialité, de neutralité, le devoir de discrétion, l'honneur et la considération morale de la magistrature.
Il est aussi impératif que la situation professionnelle des magistrats ne soit liée qu’aux considérations professionnelles et morales, de sorte à ce que leur performance et la prise de décision quant à leurs situations professionnelles se fassent sur la base de critères de compétence, d’efficience et de droiture et non sur la base de leur appartenance associative.
Pour autant que le Conseil se focalise sur la déontologie, celle-ci étant un système de valeurs vertueuses qui représente la forme la plus élevée de la conscience humaine et exprime l’attachement de l'Homme aux principes de bonté et de droiture, en leur octroyant une place centrale dans son comportement au sein de la société. Cela amène le magistrat à évoquer les valeurs de justice, d'équité et d'égalité dans son comportement habituel et à faire de sa conscience le vigile de ces valeurs en tant que conviction personnelle avant qu'elles ne soient des obligations légales. Le Conseil concentre donc ses efforts sur la qualité de la formation des magistrats dans l'exercice de leur profession, à savoir l'application équitable de la loi entre les justiciables.
Ces considérations ont été approuvées au cours du dernier trimestre de l'année dernière par un consensus unanime des bureaux des associations professionnelles. Le Conseil félicite les magistrats du Royaume pour ce consensus, qui incarne la volonté de la Constitution, des lois, des traditions et des coutumes judiciaires, et les appelle tous à continuer à respecter les normes professionnelles de la magistrature et à suivre l'approche réformiste décrétée par leur Président, Sa Majesté le Roi. Les magistrats du Royaume se doivent par ailleurs de garder à l'esprit les sages paroles prononcées par Sa Majesté dans le discours du Trône de 2013 : « Depuis que Nous est échue la mission d'assumer la direction de la nation, Nous avons à cœur de réaliser la réforme de la justice, sa moralisation et sa modernisation, ainsi que le renforcement de son indépendance. Car, il ne s'agit pas seulement de faire prévaloir le droit et de réparer les injustices, mais également de créer un climat de confiance qui favorise le développement et incite à l'investissement. »
Mesdames et messieurs :
Tout en vous renouvelant mes remerciements pour votre présence à cette audience solennelle, et pour l'honneur que vous faites au pouvoir judiciaire par votre présence parmi nous, permettez-moi aussi d’exprimer toute ma gratitude au ministre de la Justice et à l'ensemble du personnel du ministère pour leur coopération remarquable et leur partenariat fructueux, ainsi que pour son respect de l'indépendance de la magistrature et l’effort qu'il déploie pour appuyer les efforts du Conseil à cet égard. Ces remerciements vont également au président du gouvernement et à tous ses membres, en particulier au ministre de l'Intérieur, au secrétaire général du gouvernement, au ministre délégué chargé du budget et aux autres secteurs gouvernementaux qui coopèrent avec les institutions judiciaires.
Je tiens également à exprimer mes remerciements et ma gratitude aux présidents de la Chambre des représentants et de la Chambre des conseillers, au président de la commission de la justice et à celui de la commission de législation, ainsi qu'à l'ensemble des parlementaires pour leur excellente coopération dans la conduite des textes relatifs à la magistrature et pour leur implication dans le respect de l'indépendance de cette dernière.
Je voudrais également remercier toutes les institutions constitutionnelles, les administrations nationales et les institutions internationales avec lesquelles le Conseil coopère, ainsi que les autorités judiciaires des pays amis dont les juges de liaison sont ici avec nous aujourd'hui au nom de leurs représentants dans le Royaume. Je remercie en particulier le Conseil supérieur de la magistrature de Belgique, avec lequel nous avons terminé l'année dernière un jumelage réussi et avec lequel nous auront tout à l'heure le plaisir de signer un accord de coopération avec sa présidente.
Des remerciements sont également adressés à toutes les professions de la justice, en particulier au Président de l’association des barreaux du Maroc, aux bâtonniers des ordres des avocats, aux présidents des organismes professionnels des huissiers de justice, des adouls, des notaires, des traducteurs et des experts, ainsi qu'à tous les professeurs appartenant à ces professions.
Je tiens à exprimer ma gratitude à Mesdames et Messieurs les magistrats des différentes juridictions du Royaume pour leur performance remarquable, tant en termes de nombre de décisions rendues qu'en termes de qualité. Je remercie également les membres des greffes des différents tribunaux du Royaume pour leur performance exceptionnelle.
Enfin, je remercie le Procureur général du Roi, Président du Ministère public, et tous ses conseillers, Mesdames et Messieurs les magistrats du Ministère public et les membres du Ministère public de toutes les juridictions du Royaume pour leur coopération et leur soutien aux efforts du Conseil et de toutes les institutions judiciaires.
Enfin, j'espère qu'au cours de l'année en cours, nous serons en mesure de réaliser de nouvelles avancées concernant le développement de la performance de la justice, l'amélioration de ses services et la consolidation de la structure de l'État de droit et des institutions, tel que l'a envisagé Sa Majesté le Roi.
Puisse Dieu nous assister, Wa Assalamou alaykoum wa rahmatou Allah.
Section16, Hay Riyad, CP 1789, Rabat
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