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lundi 26 février 2024
Allocution du Président délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire à l’occasion du lancement de la troisième session de formation au profit des nouveaux responsables judiciaires, tenue à Rabat le 26 février 2024.

Honorable audience ;

Je vous remercie pour votre présence au lancement de cette session de formation. Permettez-moi d’adresser mon allocution à nos collègues magistrats auxquels cette formation est destinée.

Mesdames et messieurs les responsables judiciaires et substituts des responsables judiciaires ;

Vous féliciter pour l’immense honneur dont vous a comblé Sa Majesté le Roi, Président du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, qui a placé en vous sa confiance et vous a chargé de l’importante responsabilité de diriger des tribunaux, est en soi un honneur pour le Conseil qui espère avoir fait le bon choix en vous désignant, considérant que vous êtes le paradigme du magistrat qui a excellé dans ses tâches judiciaires et s’est armé de valeurs nobles, de telle sorte que cela vous a qualifiés pour prendre part à une nouvelle expérience dans le domaine de la gestion administrative des tribunaux et ministères publics. Cette mission fait l’objet de grandes attentes quant à l’amélioration de la performance judiciaire et l’atteinte de l’efficience et de la crédibilité du système judiciaire.

Tout en vous félicitant pour cette confiance royale largement méritée, je vous rappelle les missions que vous a attribué votre président, Sa Majesté le Roi, qui a considéré que : « La magistrature est le pilier de l’égalité et de l’équité devant la loi ; elle renforce la stabilité sociale » et Sa Majesté est allé jusqu’à considérer que « La force de la légitimité même de l’Etat et l’intégrité de ses institutions est tirée de la force de la justice qui est le fondement de la souveraineté » (discours historique du 20 août 2009).

Si Sa Majesté le Roi a veillé, depuis que lui a été dévolue la Haute responsabilité de diriger notre patrie à accorder une attention particulière à la réforme du système judiciaire, à commencer par la magistrature, qui est l’une des fonctions du commandant des croyants en sa qualité de garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire [1]. Sa Majesté a voulu réaliser un objectif crucial, à savoir l’appui de la crédibilité de la justice, comme mentionné par Sa Majesté dans son discours du 20 août 2009 : «Quant aux objectifs visés par cette réforme, il s'agit de consolider la confiance dans une justice efficiente et équitable et d'en conforter la crédibilité, tant il est vrai qu'elle constitue un rempart inexpugnable pour la défense de l'Etat de droit, un fondement essentiel de la sécurité judiciaire et de la bonne gouvernance et un facteur d'impulsion du développement.
L'on doit également veiller à assurer la mise à niveau de ce secteur pour lui permettre d'être au diapason des mutations qui s'opèrent à l'échelle nationale et internationale et de répondre aux exigences de la justice du vingt-et-unième siècle
. »

Sa Majesté a aussi affirmé dans son message royal adressé aux participants à la Conférence internationale sur l’indépendance du pouvoir judiciaire que : « Il importe aussi de relever un autre défi qui consiste à accroître la confiance en la Justice, érigée en rempart inexpugnable de défense de l’Etat de droit et en levier essentiel du développement. A cette fin, l’appareil judiciaire doit se perfectionner et améliorer son rendement pour être à même d’accompagner les transformations économiques et sociales à l’œuvre dans toutes les sociétés ».

Sa Majesté a également déclaré que : « Nous veillons tout particulièrement à ce que l’objectif ultime de la constitutionnalisation de l’indépendance de la justice, soit de le mettre au service des citoyens, au service du développement et au service de l’Etat de droit ».

Dans son discours royal prononcé à l’occasion de l’ouverture de la première session du parlement le 08 octobre 2019, Sa Majesté le Roi avait souligné que : « La primauté de la Constitution et des lois du Royaume, ainsi que la protection des droits et devoirs de citoyenneté sont confiés à la magistrature ». Sa Majesté a aussi exprimé sa Haute volonté d’instaurer une nouvelle notion de la réforme de la justice, qui est celle de mettre « la justice au service du citoyen ». Sa Majesté a déclaré à ce propos : « En mettant la justice au service du citoyen, nous envisageons l’instauration d’une justice caractérisée par sa proximité des justiciables, la simplicité et la célérité de ses procédures, l’impartialité de ses jugements, la modernité de ses structures, l’efficacité et la probité de ses magistrats, sa stimulation du développement ainsi que son engagement envers la primauté du droit, la réalisation des droits et le traitement des injustices ».

Mesdames et messieurs les responsables judiciaires ;

Vous avez certainement déduit de ces précieux discours royaux, l’ampleur de la responsabilité dont vous êtes chargés en vertu de l’honneur qui vous a été décerné; il est certain aussi, que vous garderez à l’esprit tous vos engagements constitutionnels, juridiques et moraux qui découlent de votre qualité de responsables judiciaires ; lesquels seront vos principaux mécanismes de travail sur vos nouvelles missions qui nécessitent, bien entendu, de maitriser d’autres mécanismes aussi. En effet, votre rôle ne se limite plus aux tâches judiciaires puisque vous êtes désormais appelés à diriger l’administration judiciaire dans toutes ses diverses ramifications, dont la supervision du travail de vos collègues, la mise en œuvre des outils de l’efficience judiciaire s’agissant de la mise en l’état des affaires et le suivi de leur déroulement pour respecter les délais raisonnable de jugement, faciliter les procédures qui aident à valoriser le temps judiciaire et à améliorer les délais indicatifs, notamment le contrôle des procédures de notification des convocation et des jugements et autres plis judiciaires, en outre de l’amélioration des procédures d’échange des dossiers et documents au sein des tribunaux ainsi que leur transfert vers les juridictions de recours, sans oublier tout ce qui a trait à l’exécution des décisions des magistrats rendues en matière de procédures d’instruction relatives aux procès, la rédaction et l’impression des jugements et arrêts, la remise de copies aux parties et aussi l’accélération des différentes procédures judiciaires et des différentes tâches de l’administration judiciaire ayant une nature judiciaire ou relatives à l’accès à la justice. [2]

Vous êtes également chargés de l’administration judiciaire dans ses volets administratifs et financiers et tout ce qui a trait à la gestion des biens et ressources financiers des tribunaux et à la situation professionnelle de leurs fonctionnaires. [3]

Figurent aussi parmi vos missions, la supervision directe de la performance de vos collègues magistrats et leur encadrement, leur incitation au respect des devoirs professionnels et moraux, la facilitation de leurs conditions de travail et le traitement des difficultés auxquelles ils font face, ainsi que l’appui de leur adhésion aux efforts qu’ils sont appelés à fournir pour améliorer l’efficience judiciaire, surtout en ce qui concerne la rédaction et l’impression des décisions judiciaires [4] et la contribution à la transition vers le tribunal numérique. Il est certain que vous saisissez l’importance de ce sujet et que vous appréhendez sa pertinence s’agissant de la réalisation de la vision réformiste projetée par Sa Majesté le Roi qui a déclaré que : « Mettre en place une justice de qualité reste une préoccupation majeure pour répondre aux attentes des individus et de la société. Pour parvenir à un tel résultat, l’administration judiciaire doit être constamment améliorée pour seconder les magistrats dans leur mission. A cet égard, l’expérience atteste des progrès réalisés grâce à l’informatisation de la justice » [5].

C'est dans cette lignée que le Conseil vous invite à prendre part à ce projet moderniste, pour lequel il est chargé du suivi de la performance des magistrats, de leur formation et de leur qualification à cet égard, en plus de contribuer aux côtés des principaux partenaires dans le domaine judiciaire à son développement et à son amélioration. Notant que le pouvoir judiciaire et le Ministère chargé de la Justice étudient le sujet dans sa globalité et travaillent actuellement à la mise en place de certaines de ses étapes expérimentales dans quelques tribunaux afin de les doter des logiciels adéquats pour la rédaction des décisions judiciaires tout en facilitant l’usage de ceux-ci pour les magistrats, en plus de fournir tous les moyens nécessaires à cet effet, y compris la formation.

Mesdames et messieurs les responsables judiciaires ;

Les tâches que vous exercez du fait de votre position de responsables judiciaires ne se limitent pas à l’aspect professionnel mais s’étendent à l’aspect humain ayant trait à votre relation avec votre entourage, ce qui requiert de vous d’acquérir les mécanismes appropriés pour traiter avec vos supérieurs, subordonnés et collègues ainsi qu’avec les professionnels de la justice, les justiciables et autres, avec le respect qui leur est dû et qui découle des valeurs éthiques de la justice, et le sérieux requis pour les procédures professionnelles. Il est certain que vos interactions avec les justiciables nécessitera de l’humanisme pour comprendre leurs circonstances et leurs problèmes et veiller à les résoudre grâce aux droits que leur assure la loi et les obligations qu’elle leur impose.

En outre, vous serez appelés à gérer les crises urgentes et à résoudre les conflits professionnels, ce qui nécessitera un effort de sagacité et de circonspection qui caractérisent le magistrat performant et font partie des caractéristiques dont le responsable judiciaire doit faire preuve pour préserver la dignité et la réputation de la magistrature et gagner la confiance de ses collègues et des parties.

En somme, vos nouvelles fonctions sont multiples et diverses ; elles ne se limitent pas à la supervision judiciaire et à la gestion des correspondances administratives autant qu’elles résident dans la supervision du bon fonctionnement de la justice au sein de vos circonscriptions judiciaires, dans tous ses détails professionnels et moraux et aussi, la bonne gestion des relations entre les acteurs et les personnes intéressées par ce secteur. C’est pour cela que j’ai maintes fois assimilé la mission  du responsable judiciaire à celle du chef d’entreprise : tous deux tenus de maitriser l’art de la direction et de la gestion et les méthodes d’encadrement et de motivation et tenus de détenir les compétences nécessaires pour diriger une équipe et être aptes à gérer et à utiliser les ressources et outils et disposer d’indicateurs sérieux pour mesurer et évaluer la performance, puisque l’objectif est la qualité de production et l’obtention de bénéfices importants sans porter atteinte à la viabilité de l’entreprise. Cela dit, si certains pensent que la réussite de l’entreprise se manifeste par le gain matériel et la duplication du capital, la réussite de « l’entreprise judiciaire » se caractérise par le gain de la confiance de la société et la contribution à l’élaboration des politiques publiques et au maintien de la sureté et de l’ordre public dans leurs divers aspects : économique, social, culturel et sécuritaire. Bien entendu, cet objectif ne peut être atteint sans une application juste de la loi, suivant les conditions d’indépendance, d’impartialité, de probité et d’intégrité et de mise en exergue des bonnes mœurs, mais aussi en atteignant l’efficience judiciaire grâce à la qualité des jugements, à la bonne et rapide prestation de services, au bon accueil, à la crédibilité et au bon dialogue qui sont toutes de hautes valeurs judiciaires et traits humains dont sont dotés les magistrats, que la Constitution a positionné en  tant que garants des droits des individus et groupes d’individus et de leurs libertés et sécurité judiciaire, et en tant que responsables de la juste application de la loi. [6]

Mesdames et messieurs les responsables judiciaires ;

Nous attendons de vous que vous interagissiez de manière positive et sérieuse avec les initiatives du CSPJ visant à encadrer le travail judiciaire à travers les dispositions légales et morales qui visent à habiliter les magistrats à l’exercice de leurs missions, au développement de leurs compétences professionnelles et à la mise en place de critères équitables d’évaluation et de traitement des situations professionnelles des magistrats et leur application. Ainsi, votre interaction ne sera pas effective si vous ne participez pas à l’encadrement positif et au soutien moral des magistrats qui travaillent sous votre direction, en leur fournissant toutes les explications nécessaires à la compréhension des procédures administratives professionnelles que cela nécessite et dont vous êtes tenus de contrôler l’application et le respect ainsi que le suivi des procédures légales de plainte à l’égard de celles-ci. Cela nécessite de vous que vous accompagniez les efforts entrepris par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire en vue d’améliorer l’application des mesures prévues par la Constitution, les lois, le règlement intérieur du Conseil et les arrêtés du Conseil dont il espère parachever l’organisation dans les plus brefs délais et implémenter les outils nécessaires à leur exécution, prenant en compte l’équité, l’efficience et la transparence qu’il doivent amener, notamment les dispositions apportées par les réformes des deux lois organiques du Conseil et son règlement intérieur ainsi que le Statut des magistrats.

Mesdames et messieurs les responsables judiciaires ;

Il est certain que cette session de formation est un engagement professionnel s’inscrivant dans le cadre de l’habilitation des magistrats à la prise en charge de la responsabilité judiciaire et au développement de leurs compétences. Pour cela, je vous serais reconnaissant de l’approcher avec un désir d’apprendre, un profond sentiment de responsabilité et la passion d’un savant assoiffé de connaissance.

Il est tout aussi certain que vos collègues et toutes les personnalités chargées de la formation feront tout leur possible pour partager avec vous toute l’expérience et les connaissances qu’ils ont acquises et je les en remercie, en mon nom et en le vôtre.

Cette session de formation n’aurait jamais vu le jour sans le précieux concours et les valeureux efforts fournis par la Présidence du Ministère public et le Ministère de la justice, qui se sont alliés au Conseil pour organiser, programmer et choisir les sujets et les formateurs, je remercie tout particulièrement le Procureur général du Roi, Président du Ministère public et monsieur le Ministre de la justice ainsi que les Secrétaires généraux des deux institutions et tous les cadres ayant contribué de près ou de loin.

 

Wa assalamou alaykoum wa rahmatou Allah.

 

[1] –  Extrait du discours du 20 août 2009.

[2] Arrêt de la Cour constitutionnelle n°89/19 du 08/02/2019 au sujet de la conformité de la loi n°38-15 relative à l’organisation judiciaire à la Constitution.

[3]  Arrêt susmentionné et articles 19 et 23 de la Loi 38-15 relative à l’Organisation judiciaire.

[4] – Article 108 bis de la Loi organique relative au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire.

[5] – Message royal adressé par Sa Majesté le Roi aux participants à la 1ère Conférence internationale sur la justice organisée à Marrakech le 02 avril 2018.

[6] –  Articles 110 et 117 de la Constitution.

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