Rabat, le 27 novembre 2023
Au nom de Dieu tout puissant
Nous organisons aujourd’hui une rencontre des plus importantes, un nouveau cap historique sur le parcours de l’appui de l’indépendance du pouvoir judiciaire au sein de notre pays, résidant dans la supervision directe par ce pouvoir de l’institut de formation des magistrats qui est indéniablement une pierre angulaire dans l’édifice de la justice indépendante. Ce pas est une consécration de la volonté royale de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu l’assiste, avec la contribution du gouvernement et du parlement, ce qui consacre une fois de plus le modèle marocain unique en son genre, où tous les pouvoirs s’unissent pour consolider le statut de la nation, et les citoyens se mobilisent derrière leur monarque, en temps d'aisance comme de détresse, montrant l’exemple au monde en termes d’unité, de solidarité et de cohérence.
La passation de pouvoirs sur l’Institut supérieur de la magistrature du Ministre de la Justice au Président délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire n'est pas seulement une formalité, mais une grande décision politique, par laquelle l'État marocain entend soutenir les fondements de l'indépendance de la magistrature et doter le système judiciaire émergent des outils nécessaires à la réussite de la réforme profonde et globale du système judiciaire que Sa Majesté le Roi, Président du Conseil supérieure du pouvoir judiciaire et Chef de l'État, dirige avec sagesse constance et clairvoyance.
La contribution du gouvernement et du parlement à l’exécution de cette étape pionnière, m’incite à exprimer mes remerciements et ma gratitude au gouvernement en la personne du Ministre de la Justice, qui a pris l'initiative de présenter le projet de loi et a suivi toutes les étapes de son avancement, jusqu'à sa publication au Bulletin officiel, pour aujourd’hui, nous honorer par cette passation de pouvoirs en nous promettant davantage de soutien.
Des remerciements doivent également être adressés au Secrétaire Général du Gouvernement et au Ministre délégué chargé du Budget, qui ont grandement contribué au processus législatif de la loi n° 37.22 relative à l'Institut.
J’adresse également mes remerciements aux présidents de la Chambre des Représentants et de la Chambre des Conseillers, ainsi qu'à mesdames et messieurs les Représentants et Conseillers, et je m’adresse ici plus particulièrement aux présidents de la Commission de la justice et de la Commission législative de la Chambre des Représentants et de celle des Conseillers, ainsi qu’aux Représentants et aux Conseillers, qui ont contribué à la célérité de l’approbation de la loi par le parlement, et son enrichissement par de nombreux amendements qui en ont fait, du moins au stade actuel, un texte juridique en mesure de développer le parcours de formation des magistrats, d'élever leurs capacités et de les qualifier pour résoudre les différends, avec une vision profonde qui s’immerge dans l’esprit des textes de loi et en extrait l’essence de la justice et de l’équité.
Le choix de confier la mission de supervision de la formation des magistrats au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire n'est ni le résultat d'une coïncidence, ni un choix arbitraire, mais bien l’aboutissement d'un dialogue sérieux et réfléchi, et d'une délibération réfléchie, sur lequel ont débouché les recommandations du Dialogue national pour la réforme du système judiciaire, au cours des années 2012 et 2013, en tant qu’expression de l’indépendance du pouvoir judiciaire et élément indispensable pour habiliter les cadres judiciaires.
Cette approche a notamment été approuvée par la loi organique n°13.22 du 16 mars 2023, modifiant et complétant la loi organique n°100.13 relative au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, dont l'article 108 bis dispose que le Conseil assume les tâches de formation et de qualification des magistrats et de renforcement de leurs compétences professionnelles, que ce soit au sein de l’établissement de formation des magistrats, ou au niveau des circonscriptions judiciaires. Cette prérogative se devait d’être attribuée au CSPJ car c'est l'organisme le mieux placé pour connaître les besoins en formation des juges, et est conforme aux dispositions de l'article 108 bis qui confère au Conseil des tâches liées à la supervision générale des affaires judiciaires, au suivi de la performance des magistrats au sein des tribunaux et à la prise des mesures adéquates pour l'améliorer et l’encadrer afin d'accroître l'efficience judiciaire.
Mesdames et messieurs ;
Si l'attente du rôle pionnier que jouera l'Institut supérieur de la magistrature actuellement et à l'avenir est considérée comme une ambition légitime et une aspiration réalisable, compte tenu des compétences dont disposent le pouvoir judiciaire et la Direction de l'Institut, et qui sont qualifiés pour faire de l’Institut un instrument efficace dans la formation des compétences judiciaires futures, perfectionner les talents émergents et soutenir l'expérience de personnalités professionnelles de grande envergure, tout cela ne devrait pas voiler les réalisations accomplies par l’Institut au cours de ses soixante-et-une années d'existence, qui sont une source de fierté pour le système judiciaire marocain, et en ont fait un édifice juridique et judiciaire reconnu pour son sérieux et sa distinction aux niveaux national et arabe et ce, depuis la création en 1962 de l'Institut de Formation des magistrats, sur volonté de Sa Majesté feu le Roi Hassan II, qui a honoré le lancement de la formation de sa présence personnelle, que Dieu l’ait en sa miséricorde. Cet institut, qui a vu le jour dans l’enceinte du Mechouar, a permis de former plusieurs promotions de magistrats qui constituaient l’épine dorsale de la magistrature du Maroc à l’ère de l’indépendance, et firent tout le nécessaire pour contribuer au soutien de la souveraineté de l’Etat à travers la marocanisation, l’arabisation et l’unification de la justice en l’an 1965.
En 1969, le décret n°2-69-587 porta création de l'Institut national des études judiciaires, qui semble avoir eu plusieurs sièges au fil des années, du Ministère de la Justice à la place Mamounia, au quartier l’Océan à Rabat, puis à son siège actuel, où nous nous trouvons aujourd'hui, qui à son tour fut transformé en Institut supérieur de la magistrature en 2002 et est devenu une institution publique. L'Institut, sous toutes ses dénominations précitées, a toujours fait partie de la structure du ministère de la Justice, ou se trouvait sous sa tutelle, jusqu'à la promulgation de la loi n° 37.22, publiée au Bulletin officiel du 7 septembre 2023, qui a transféré la tutelle de l'Institut Supérieur de la Magistrature au pouvoir judiciaire créé en 2017.
Outre la première génération de magistrats formée à l'Institut de formation judiciaire entre 1962 et 1969 qui comptait environ 612 magistrats, l'Institut national des études judiciaires et l'Institut supérieur de la magistrature ont permis de former, depuis 1975, 45 promotions d'attachés judiciaires, en plus d'autres promotions diplômées avant le début de la numérotation des promotions, entre 1969 et 1974.
Ceci porte le nombre de juges diplômés de l'institut, à plus de 7 000 magistrats, qui ont bénéficié d'une formation de base, auxquels s’ajoutent 467 magistrats ayant bénéficié d'une formation spécialisée, ainsi que plusieurs milliers de magistrats qui ont bénéficié d'une formation continue dans diverses compétences, techniques de rendement des jugements et de règlement des litiges.
L'institut a également contribué à la formation de juges militaires parmi les officiers des Forces armées royales ainsi qu’à la formation de quelques 272 magistrats étrangers, ressortissant de 12 Etats frères, dont certains sont devenus de grands noms de la magistrature dans leurs pays respectifs et y ont occupé des postes de privilège. Cela était le cas aussi pour les diplômés marocains de l'Institut supérieur de la magistrature, dont certains ont assumé des missions gouvernementales, diplomatiques ou internationales, outre la contribution de nombre d’entre eux à la gestion des affaires judiciaires nationales aux plus hauts niveaux du corps de la magistrature.
L'Institut forme actuellement les 46e et 47e promotions d'attachés judiciaires, qui comptent 550 futurs magistrats.
Par ailleurs, l’Institut a contribué à la formation préparatoire de 6899 fonctionnaires de la justice, à la formation spécialisée de 346 cadres et à la formation de 788 formateurs et de 47330 fonctionnaires qui ont bénéficié d’une formation continue.
L'institut a également contribué à la formation de base de 1087 huissiers de justice et de 1304 adouls.
Ces chiffres suffisent à eux seuls à louer la performance de l’Institut supérieur de la magistrature et à immortaliser ses valeureuses réalisations qui ont eu un grand effet sur l’amélioration de l’efficience de la justice et des professions de la justice au sein de notre pays, ce qui nous appelle à exprimer notre appréciation et notre respect pour les compétences nationales qui ont dirigé l'Institut et contribué à la gestion de ses affaires administratives et pédagogiques, à commencer par les ministres de la justice et les directeurs généraux qui se sont succédés à sa tête, ainsi que les cadres administratifs et le personnel enseignant ; nous prions pour la paix des âmes de ceux d’entre eux qui nous ont quittés, et souhaitons le meilleur à ceux qui sont encore en vie et parmi eux, les illustres noms présents aujourd’hui parmi nous et qui ont illuminé la voie pour les magistrats de notre Royaume par le passé, et continuent encore d’en faire de même pour nous, par leur présence à nos côtés lors de toutes les occasions, leur participation aux évènements académiques et leur contribution par des avis ou des conseils. Ils sont en réalité une mémoire vivante sur laquelle nous nous appuyons pour écrire l’histoire judiciaire orale et nous compterons sur leur coopération pour écrire l'histoire de l'Institut supérieur de la magistrature et préserver sa mémoire pour les générations à venir. Tout en remerciant nos prédécesseurs pour ce qu'ils nous ont apporté, nous espérons qu'ils nous accompagneront dans ce travail que l'administration de l'Institut a été chargée de documenter.
Mesdames et messieurs ;
Le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire a décidé de faire de l'Institut Supérieur de la Magistrature un laboratoire de création de la qualité et de l'excellence et ne ménagera aucun effort pour ce faire. Le Conseil est certain que les compétences judiciaires nationales seront au rendez-vous pour donner une nouvelle dynamique au système judiciaire national, qui lui permettra de gagner le pari de la réforme menée par Sa Majesté le Roi, et de suivre le rythme du développement juridique et judiciaire de notre pays, en lien avec la perspective mondiale sur le rôle de la justice et ses finalités que la Constitution marocaine a sommé en deux idées principales, à savoir : la juste application de la loi (article 110), et la protection des droits et libertés (article 117), en raison de l’impact de ces deux éléments sur le reste des exigences et des tâches assignées au système judiciaire, que ce soit en matière de protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ou de protection des investissements et d'attraction des capitaux, qui sont source de richesse et d'emplois, ou encore en assurant la sécurité judiciaire au sens global du terme qui mène à l’atteinte de la sûreté au sein de la société.
Il ne fait aucun doute que le Conseil d'administration de l'Institut, qui a été réformé par la loi n°37.22, accordera une grande attention aux programmes de formation et de sciences d’actualité qui permettront au système judiciaire national de suivre le rythme du système économique et juridique mondial, ainsi que de protéger les constantes du Royaume, les droits et libertés des individus et des groupes, et de préserver leurs biens.
D’autre part, les tâches que le législateur a assignées à l'Institut Supérieur de la Magistrature dans sa forme actuelle à savoir, la formation de base, spécialisée et continue des magistrats et des catégories de professionnels et d'employés nommés au corps de la magistrature, et la formation en matière d'administration judiciaire, ainsi que la réalisation d’études, de recherches et de publications dans divers domaines juridiques et judiciaires, dont pourrait également bénéficier les magistrats ou usagers étrangers de la justice, répondent tous aux besoins de qualification judiciaire et de renforcement des compétences professionnelles et permettront au Conseil d’administration et à la direction de l’Institut d’entamer des chantiers innovatifs dans les domaines de la formation et de l’encadrement, à commencer par la définition des cursus et des programmes de formation, l’organisation de leur déroulement, la sélection des encadrants, l’amélioration de ses méthodes et la diversification de ses moyens ; ils ouvrirons, en outre les portes de l'Institut aux magistrats des pays africains amis ainsi qu'aux magistrats des pays arabes frères, suivant l’approche de la coopération sud-sud telle qu’envisagée par Sa Majesté le Roi pour les différentes politiques publiques marocaines. Tout cela résulte de la conviction du pouvoir judiciaire dans l’importance de la formation pour améliorer les performances judiciaires, chose que Sa Majesté le Roi, que Dieu l’assiste, a souligné dans le Message Royal qu’il a adressé lors de la première Conférence de la Justice à Marrakech en 2018, où il a déclaré que : « Atteindre les objectifs existants dans tous les domaines liés à la réforme de la justice dépend de la réalisation d’un ensemble de conditions, dont la plus importante est la qualification des acteurs du pouvoir judiciaire ». Sa Majesté a réaffirmé cette déclaration dans son message royal adressé aux participants à la Deuxième Conférence de la Justice en 2019, en exigeant qu'une attention particulière soit accordée à la formation spécialisée des différentes composantes de la justice, afin d'améliorer les compétences des tribunaux à rendre des décisions justes et adéquates, dans des délais raisonnables.
Mesdames et messieurs ;
Un effort supplémentaire d’instauration nous attend et nous œuvrerons, au sein du Conseil d'administration, en coopération avec le pouvoir exécutif pour l’accomplir dans les plus brefs délais. Ce travail nécessitera l'élaboration de textes réglementaires liés à la loi n° 37.22, ainsi que les décisions visant à établir l'organisation structurelle de l'Institut, ses comités et le système de formation, en plus de prêter attention aux conditions des attachés de justice et des instances de formations, au soutien du système déontologique et à l'entretien du bâtiment de l'Institut. Telles sont les tâches dont devront s’acquitter le Conseil d’administration de l’Institut et les autorités compétentes du pouvoir judiciaire dans la période à venir.
Enfin, je vous remercie d'avoir participé à cette rencontre symbolique très significative, qui constitue un jalon historique important dans le parcours de l'Institut Supérieur de la Magistrature, je voudrais également exprimer mes remerciements au Directeur Général de l'Institut et à ses cadres administratifs, aux professeurs et au personnel, et à tous les acteurs qui ont contribué et continuent de contribuer à l'encadrement et à la formation des magistrats et des attachés judiciaires. Je remercie aussi les institutions nationales et étrangères, partenaires de l'Institut, et souhaite à nos enfants, les attachés judiciaires qui poursuivent actuellement leur formation, beaucoup de succès.
Wa assalamou alaykoum wa rahmatou Allah.
Section16, Hay Riyad, CP 1789, Rabat
sg@cspj.ma